Header Critique : PHOBIA 2 (4BIA2)

Critique du film
PHOBIA 2 2010

4BIA2 

En 2008, le film thaïlandais PHOBIA (orthographié aussi 4BIA) avait la bonne idée de relancer la mode du film à sketches en confiant un segment à des réalisateurs locaux spécialisés dans le genre (ou presque) : Banjong Pisanthanakun et son acolyte Parkpoom Wongpoom (SHUTTER, ALONE), Paween Purijitpanya (BODY) et Yongyoot Thongkongtoon (producteur de ALONE et COMING SOON et réalisateur des comédies IRON LADIES et IRON LADIES 2). Gros succès en Thaïlande, c'est en toute logique qu'une séquelle est mise aussitôt en chantier. PHOBIA 2 joue la surenchère en ajoutant un sketch et propose cinq histoires au lieu de quatre. Le gros de l'équipe de réalisateurs reste inchangé. Yongyoot Thongkongtoon laisse cependant sa place à l'excellent réalisateur Songyos Sugmakanan (LE PENSIONNAT) tandis que le segment supplémentaire est confié au producteur Visute Poolvoralaks (NANG-NAK, SHUTTER) pour qui c'est la première réalisation. S'enchaînant sans lien particulier, les cinq histoires de PHOBIA 2 vont revisiter des figures bien connues du cinéma local et international en nous promettant le maximum de frissons.

Le film s'ouvre avec NOVICE de Paween Purijitpanya. Un jeune adolescent turbulent se rend coupable d'un accident coûtant la vie de son propre père. Sa mère l'envoie alors dans un monastère où il se fait «apprenti» moine. Tandis que le jeune tente de se familiariser avec les conditions de vie austères de son nouveau quotidien, un étrange appel de la forêt commence à le harceler. Assez classique, NOVICE est une histoire de fantôme personnifiant le remord comme on en a déjà vu. Mais l'ambiance très particulière amenée par l'environnement du monastère bouddhiste relève pourtant grandement la sauce et imprime le film d'une couleur locale très intéressante. Souvent stressant, le métrage tend pourtant vers une poésie introspective qui explose lors d'un plan final d'une grande beauté. Une réussite mineure qui sert de mise en bouche.

WARD de Visute Poolvoralaks joue dans un registre plus frontal. Un jeune homme est victime d'un accident de voiture. Le voici cloué au lit dans un hôpital avec un voisin de chambre très étrange. Bien qu'un rideau sépare les deux lits, notre héros tente d'apercevoir par tous les moyens son voisin qui semble avoir passé de vie à trépas. Contrairement à son prédécesseur, WARD ne cherche pas midi à quatorze heure et mise tout sur l'effet choc et les «jumpscares». On ne déflore pas trop l'intrigue en révélant que le mort va tenter de posséder le vivant via une foule de scénettes flippantes et bien gores (comme lorsque le vieux se met à vomir du sang sur le visage du jeune). Ca n'a ni queue ni tête, mais on bondit régulièrement de son fauteuil. La mission est accomplie pour un segment qui vise le frisson immédiat.

BACKPACKERS de Songyos Sugmakanan est l'une des histoires les plus ambitieuses. Un couple de japonais fait de l'autostop en Thaïlande. Ils vont être embarqués par une camionnette chargé d'un contenu pour le moins terrifiant. Difficile de résumer en quelques mots cette histoire pleine de rebondissements qui fait le grand écart entre la situation des passeurs de drogues (par ingestion) et le film de zombies. Efficace, musclé et parfaitement mis en scène, BACKPACKERS est l'un des pics qualitatifs de PHOBIA 2. Un segment que l'on peut, sans conteste, qualifier d'excellent et qui se finit sur l'image folle d'un enfant zombie sautant à la gorge d'un moine bouddhiste.

Après une telle décharge de bonnes idées, le sketch SALVAGE de Parkpoom Wongpoom fait descendre le niveau en proposant l'histoire la plus faible de l'anthologie. Une femme dirige une société de récupération de voitures et revend les véhicules accidentés retapés comme neuf. On imagine la suite. Apparitions fantômatiques, moralisation, "jumpscares" en veux-tu en voilà, SALVAGE se croit sur l'autoroute et nous endort quelque peu avec ces effets éculés. Le film va pourtant assez loin dans le gore et se permet même de terminer sur une note bien glauque et tabou que l'on ne verrait jamais dans un film américain.

Passé ce ventre mou, PHOBIA 2 nous a gardé le meilleur pour la fin avec IN THE END de Banjong Pisanthanakun qui reprend le même casting que le sketch IN THE MIDDLE du premier PHOBIA. Une équipe de tournage met en boîte la dernière séquence d'un film d'horreur où un spectre à cheveux gras doit attaquer l'héroïne du film. Tout se passerait pour le mieux si la comédienne jouant le fantôme ne souffrait d'une toux inquiétante. Elle est envoyée à l'hôpital pour un examen, le temps que l'équipe puisse tourner les plans où elle n'apparaît pas. Pourtant, la voici qui revient immédiatement sur le plateau. Alors ? Vrai fantôme ou petite comédienne rigoureuse prête à tout pour finir sa journée de travail ? Grâce à son excellent casting et son scénario ultra malin qui aligne non-stop les blagues et les rebondissements, IN THE END n'est ni plus ni moins qu'un irrésistible petit chef d'œuvre. C'est le pastiche qu'attendaient tous les fatigués du fantôme asiatique à cheveux longs qui squatte plus que de raison les écrans depuis maintenant dix ans. Extrêmement drôle, IN THE END est aussi un film parfaitement écrit qui nous propose de véritables moments de frissons capables de se transformer la seconde suivante en gag imparable.

Comme tout film à sketches, PHOBIA 2 est donc inégal. Un segment plutôt pauvre, deux efficaces mais routiniers, une bonne surprise et une grosse bombe pour terminer. Le bilan est nettement positif pour ce condensé de l'horreur made in Thaïlande. Une horreur certes toujours engoncée dans les vieilles ficelles mais qui a le mérite de rester proche de sa culture. Les aventuriers du cinéma de genre, toujours curieux de frissons exotiques, sauront apprécier ce film que nous ne sommes malheureusement pas prêts de voir distribué chez nous.

Rédacteur : Eric Dinkian
Photo Eric Dinkian
Monteur professionnel pour la télévision et le cinéma, Eric Dinkian enseigne en parallèle le montage en écoles. Il est auteur-réalisateur de trois courts-métrages remarqués dans les festivals internationaux (Kaojikara, Precut Girl et Yukiko) et prépare actuellement son premier long-métrage. Il collabore à DeVilDead depuis 2003.
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